Les galets à la source ne sont pas givrés de mousse
mais la rivière touche à sa fin elle tait son nom
tant elle a honte d’être si noire et de se jeter noire
dans le port du lendemain garance qu’elle oublie
Une coulée de lave déferle sur mes versants
frôlant le laurier blanc qui se flamme la beauté
tient à peine debout la beauté tient en équilibre
toute sa vie durant il faut abuser d’être à ses côtés
Tout se calcine incessante coulée
qui étouffe la lumière perpétuelle et les flûtes enchantées
et le chant de la terre et le mystère coulée supra
–poétique béance dans ce creux de monde qui hante
les nuits jaillies les nuits démunies sous les cendres
s’asphyxient les rimes brûlantes les métaphores corpulentes
clivées dans leur future poussière mes yeux noirs
de feu sont deux cratères pleurant l’intra –utérine terre
cimetière de signes je désolée soudain désobéis
à l’idée de déchiffrer cette suie de lire la pierre suintante
des maux la lyre cooptée de force ou de gré
à quelque épreuve aux sels d’argent les rouges –gorges
battent de l’aile l’autre est fondue les dragons crachent
le fiel des livres invendus refermés l’autre avant l’un
dans le brun Van Dyck volcanique le versant bave
et les digues se brisent seules en cet innombrable
discernement de talents artistes talents orateurs élus
élans de tant de serfs temps couvert vermine des cœurs
faons fées tous nés tous livrés à Vulcain je me prends au jeu
du recensement puis l’abandon Ô rien rien
que cette brume parfumée vapeur de pain grillé
de cannelle et de myrrhe consumés pour tant d’un geste las
sous le rideau des fils de rhubarbe j’ouvre le mea culpa
goûte le tout soupçon une gorgée de lune
me baigne dans l'écume qui croît au fil des vagues de lave
qui assiègent mon rendez –vous je quitte l’écroulement
du monde pour des paysages plus envoûtants lasse de voir
le feu pétrifier nos éphémérités temps de quitter
ces versants versatiles stériles blessée de voir quiconque
sur le quai pas à pas apeurée vers l’horaire implacable
du Departure le ferry largue les amarres
Alors sur le ponton je vois une statue un fil grége vêtu
d’un mince rai de marbre un feuillet froissé dans sa
main crispée je ferre les jumelles du capitaine
et vise l’ombre réglisse sur le port nu il pleut
Toi si j’en crois Toi tu étais pétrifié
avant même que je prisse rendez –vous
ma gestuelle alors s’ébroue se désagrège en limon
se pluie dans la mer sang demeure
Sensation hydraulique de liberté point de rencontre
et de croisées la beauté tient en équilibre toute sa vie durant
une onde suffit à la fissurer un regard à la garder debout
au loin je vois les galets qui retrouvent feu leur couleur
parmi eux un brin d’herbe a jailli la rivière n’aura plus
à taire son nom ni en aval ni en amont par –delà le
désert dissolu cette rivière qui s’appelle l’Art
dessin: David Nash
"Red column"
2010 pastel sur papier
140 / 90
Poème écrit
entre le 14 et le 18
mai 2011