'Les Dialogues obscurs'
Poèmes choisis
W.S. Graham
Traduit de l'anglais par A.S. Homassel et B. Longre
Edition bilingue, chez Black Herald Press
Ecoute. Revêts le matin
Eveillé dans lumière tombante.
Le songe d'un homme
Soudain peut hériter
Les siècles applaudissants
De son unique minute sur terre.
Et entendre les jurés vierges
Parler avec son souffle à lui
Aux garçons du coin de sa rue.
Et entendre le panier à salade
Au soir fouiller la ville.
Et entendre les cordes à sauter conviant
Soeur Mary dans le jeu.
Et entendre Willie et Davie
Parmi les fougères du Narnain
Chanter dans une brume chargée
De myrte et d'auditeurs.
Et entendre la ville haute
Pleurer sa supplique de craintes
A l'asile des pauvres proche
Du coeur battant de tous.
Et entendre les enfants jouer au loup
Et courir avec mes pieds à moi
Dans la nasse enveloppante
D'un principe suicidant.
Ecoute. Revêts le point du jour.
Eveillé en miracle.
L'auditoire est réveillé dans son lit
Sous les barres d'immeubles
Sous les docks au sucre
Sous les instants gravés.
Les siècles tournent leurs verrous
Et ouvrent sous la colline
Leurs livres et leurs portes reçus en héritage
Rassemblés pour distiller
Tels joyeux ceuilleurs de baies
Une voix unique pour nous parler.
Oui écoute. Elle emporte
La seconde et les années
Jusqu'à ce que le coeur soit dans une veste de neige
Et la tête de blanc casquée
Et que le chant dorme pour être éveillé
Par l'oreille éclatante du matin.
Ecoute. Revêts le matin.
Eveillé dans lumière tombante.
Poème extrait de 'Le seuil blanc', 1949.