IV
Tu appuies ton visage sur la mélancolie et tu n'entends
même pas le rossignol. Ou est-ce l'alouette ?
Tu peux à peine supporter l'air, partagé
entre la fidélité que tu dois
à la terre de ta mère et au bleu
presque blanc où l'oiseau se perd.
La musique, donnons-lui ce nom,
a toujours été non seulement ta blessure, mais encore
ton exaltation au milieu des dunes.
N'écoute pas le rossignol. Ni l'alouette.
C'est en toi
que toute la musique est oiseau.
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IX
Traverser le matin jusqu'à la feuille
des peupliers,
être frère d'une étoile, ou son fils,
ou peut-être père un jour d'une autre lumière de soie,
ignorer les eaux de mon nom,
les secrètes noces du regard,
les chardons et les lèvres de la soif,
ne pas savoir comment
l'on finit par mourir d'être une telle hésitation,
un si grand désir
d'être flamme, de brûler ainsi d'étoile
en étoile,
jusqu'à la fin.
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Eugénio de Andrade,
BLANC SUR BLANC
poèmes
Traduits du portugais
par Michel Chandeigne
Editions de la Différence - Littérature - Mars 1988 - Bilingue.
"Blanc sur blanc" est épuisé aux Editions de la Différence ; on peut le trouver cependant d'occasion. Il est disponible aux éditions nrf / Gallimard en poche, accompagnant "Le poids de l'ombre" et "Matière solaire".
Source de la photographie : http://www.vallejoandcompany.com/el-sol-de-invierno-poemas-de-eugenio-de-andrade/