Charlotte Salomon dans le jardin de la Villa L’Ermitage à Villefranche-sur-Mer en 1939, © Musée juif d’Amsterdam
Il ne faut rien attendre de moi.
Est-ce que tu m'entends?
Charlotte hoche doucement la tête.
Si l'on me brusque, je ne peux rien donner.
Je ne supporte pas l'idée d'être attendu quelque part.
La liberté est le slogan des survivants.
Alfred pose une main sur la joue de Charlotte.
Avant de dire : merci.
Merci pour tes dessins.
Ils sont naïfs, approximatifs, inaboutis.
Mais je les aime pour la puissance de leur promesse.
Je les aime car j'ai entendu ta voix en les regardant.
J'ai ressenti une forme de perte et une incertitude aussi.
Peut-être même l'esquisse d'une folie.
Une folie douce et docile, sage et polie, mais réelle.
Voilà.
Ce que je voulais te dire.
Nous sommes un très beau début.
Alfred repart en lui serrant la main.
Il a compris que Charlotte s'est livrée entièrement.
Pour la première fois, ses dessins ont été dictés par la nécessité.
Elle n'a pas exécuté mais vécu l'oeuvre.
Ce moment est fondateur pour la jeune fille.
L'homme qu'elle aime a posé des mots sur sa frénésie.
Ce qu'elle vient de vivre l'enivre.
Elle sait maintenant où aller.
Elle sait où se cacher, s'abriter de la haine.
Peut-elle s'avouer qu'elle se sent artiste?
Artiste.
Elle répète ce mot.
Sans être réellement capable de le définir.
Peu importe.
Les mots n'ont pas toujours besoin d'une destination.
On les laisse s'arrêter aux frontières des sensations.
Errant sans tête dans l'espace du trouble.
Et c'est bien là le privilège des artistes : vivre dans la confusion.
Pages 104/105
La dernière peinture est saisissante de force.
Charlotte se dessine face à la mer.
On la voit de dos.
Sur son corps, elle écrit le titre : Leben? oder Theater?
C'est sur elle-même que se referme l'oeuvre dont sa vie est
le sujet.
Cette image ressemble étrangement à une photo de Charlotte.
Sur ce cliché, on la voit peindre sur les hauteurs.
Surplombant la Méditerranée.
Elle regarde avec désintérêt l'objectif.
On dirait que le photographe vole un moment de sa
contemplation.
De la vie qu'elle mène en fusion avec la nature.
Charlotte semble se confondre avec les herbes.
Emerveillée par la couleur du ciel.
Face à l'éclat, on pense aux derniers mots de Goethe.
Sur le rivage de la mort, il s'est mis à crier : plus de lumière!
Il faut une lumière éclatante pour mourir.
Pages 209/210
David Foenkinos
Charlotte
Gallimard, 2014,
Collection folio, juin 2016
Prix Goncourt des lycéens 2014
Prix Renaudot 2014
De ses oeuvres, en musique
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Charlotte - Livres d'Art - GALLIMARD - Site Gallimard
"Muse confinant à l'obsession, Charlotte a accompagné, guidé le patient travail de recherches de David Foenkinos de l'appartement de son enfance à la rédaction de cette étonnante biographie d...
http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Livres-d-Art/Charlotte
Chez l'éditeur : le roman existe en livre d'art, et en folio poche
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Charlotte Salomon, retour aux sources - La République de l'Art
Il a beaucoup été question, ces derniers temps, de Charlotte Salomon, cette artiste allemande morte en déportation à Auschwitz, à l'âge de 26 ans, alors qu'elle était enceinte de cinq mois. ...
http://larepubliquedelart.com/charlotte-salomon-retour-aux-sources/
Source de la photographie et éléments biographiques sur Charlotte
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L'oeuvre totale de Charlotte Salomon publiée en France
Le grand public a fait sa connaissance grâce à David Foenkinos et à son roman Charlotte , prix Renaudot 2014. Charlotte Salomon, jeune artiste juive allemande, réfugiée en France est morte en ...
https://www.franceinter.fr/culture/l-oeuvre-totale-de-charlotte-salomon-publiee-en-france
"David Foenkinos a dit à quel point il avait été sidéré par la découverte de l’œuvre. Mais personne ne peut imaginer l’ampleur de cette œuvre avant de l’avoir vue. Imaginez une sorte de Chapelle Sixtine, en kit, 800 gouaches qu’elle a peintes dans un état de transe, en quelques mois seulement. Quand on voit les gouaches, et je les ai montrées à beaucoup de personnes, il y a systématiquement un silence, une stupéfaction."
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"Cerise sur le gâteau, Frédéric Martin publie une lettre testament inédite et stupéfiante de Charlotte, elle laisse entendre qu'elle aurait empoisonné son grand-père, lui aussi réfugié à ...
https://le-tripode.net/livre/charlotte-salomon/vie-ou-theatre
Un lien vers les éditions du Tripode