Autant de petits assassinats derrière les jours, persiennes à la violence, visages à la brume, et les grèves à l'automne, d'où la mer se retire pour mieux mimer le déluge Derrière les effeuillés de pensées cependant les désirs toujours renaissent Oui, j'effeuille les petites morts que bouches et gestuelles de ceux celles que l'on nomme passants passantes nous opposent sous leurs yeux doux pour nous rappeler à la fameuse réalité té té Qui au demeurant est fameusement laide L'amour, nu et mortel, et la beauté, voilà ce que je puis leur répondre, d'une voix que froisse un léger doute, je dois bien l'avouer Jusqu'à la rédemption finale dans l'aveu d'impuissance, relisant les vers de Rainer, pleurant dans le secret de ses cils clos, je reconnais ma soumission au couteau de la langue A la fois c'est ainsi, soumise, ou abandonnée, et la nuance appartient à chacun d'entre nous, que je puis y choisir, à moins que je choisisse d'y pouvoir puiser, moi-même et moi seule, sans bouches ni gestuelles reniflant dans mon ombre, les mots les plus ensanglantés Je les relève, je les lave, je les caresse, je les parfume, je les enduis d'un baume parme particulier dont je revendique l'essence spirituelle et dont la fabrique intérieure m'est certes inconnue Je les emmaillote dans ce qui ne veut pas se prononcer, plutôt, dans ce qui, dessous le mot, se prononce de cette capitulation humaine, celle-là même qui me flanque à terre et qui, dans la seconde suivante, me remet avec ardeur au travail de soignante Là où je suis, dans les mille prés de fleurs qui s'apprêtent à s'engoncer dans le froid et dans la stupéfaction, j'apprends encor la botanique des sentiments Je suis moi même en jachère, cela tombe plutôt bien Et dans l'attente du dégel d'un sourire, je compte les faits divers dans l'hiver implacable.