un oiseau se pose
sur la manche
picore
de ses yeux nos yeux
comme pour nous parler
Cette sorte d'amour qui vous prend à la gorge
quand vous assaille ce mot,
guerre
Des milliers de sanglots vous étranglent et un seul y suffirait, celui derrière lequel
vous ne pouvez plus vous cacher
Vous l'aimez, n'est-ce-pas, vous l'aimez, cette femme cet homme cette postérité
qu'ils enfantent ?
Et cependant il y a la guerre, enfantée par d'impénitents gouverneurs
Votre amour tombe face contre terre
sans ce souffle auquel vous aimiez boire lentement
Quelque soit sa patrie, quelque soit sa prière
Cello sonata in G minor
Quelque soit sa patrie, quelque soit sa prière
votre amour peut tomber face contre terre
Vous déposez dans vos têtes des gerbes de concertos, si créatives qu'elles
pourraient léviter, fendre les mers, enjamber les ciels bombardés
Un projectile ferait tout éclater
Il se peut alors qu'il pleuve des heures et des sons délicats sur les âmes guerrières
Qu'il pleuve tant et tant que des lacs de pardon émergent de la mort
et que de nouveaux sourciers cherchent les voies pénétrables de l'amour
Nous sommes si loin loin de l'harmonie
Néanmoins
il n'y a qu'elle comme abandon,
non plus à la désespérance devant la noirceur d'un monde sacrifié, non
L'harmonie seule comme don à notre destinée
Ensoleillez-vous les uns les autres
pendant que les cris deviennent des ombres
Nous brandissons de petites pancartes numériques, bien calés sur
notre terre,
elle,
qui va couler à pic, sous le poids de l'orgueil et de la tyrannie
Descendrions-nous encore une fois dans la rue pour ériger des barricades sans mystères,
aussi vraies que nous hantent les larmes de la honte
Soldats, je pourrais vous aimer dans vos plus sombres sanglots, dans vos bourdonnements
d'oreilles, dans vos soupirs étouffés par la haine que les démons politiques vous ont
inculquée. Au nom d'un dieu, au nom de la propriété d'une terre, au nom de rien
La terre,
elle,
s'offre à tous sans condition de croyance ni de souveraineté
Cela m'étouffe, oui, que je puisse vous aimer, soldats de plomb, mais je sais que sous la
chape infligée, votre coeur bat toujours. Votre coeur peut aimer
Il nous faut du soleil. Un soleil de peuples !
Dans la rue soulevée, un éclair blanc entre toutes les frontières,
entre les armes déposées,
une rue qui sinue du désert au cimetière,
du village à la ville, de la source à la rivière
où ne flottera plus la mort
Il est temps de nous démasquer
Il est temps d'épouser ceux et celles que nous aimons, dans le clair-obscur d'une
église, sur le parvis d'un temple, dans la forêt dévastée où quelques pousses ravivent
la splendeur déchue du vert
Aimons, derrière la porte d'une capitale, à l'eau d'un lavoir
Dans les bras muets de ces trèves, des enfants de douleur feront des courses magiques
dans les cours d'école et du cerf-volant sur le sable du sablier
Comme le vent cet été pourrait
passer ses mains dans nos cheveux, et répandre
nos rires sur les moissons d'intelligence !
si n'assaillait ce mot
Je dessine des visages
Sont-ils les vôtres ?
Je les dessinerai jusqu'à ce que
votre vrai visage apparaisse
et me reconnaisse
moi
trève des âmes
et que vos âmes en paix
me naissent dans vos embrassées d'armistice
9 juin 2014
Reproduction du haut: W. Turner, L'Ange debout dans le soleil, Londres, Tate Britain