L’orage
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L’aube grise opale lui tremble dans les mains
Son âme ce dédale se cambre se survient en cette
étendue bleue étale au couteau de chagrin
Une seconde peau de bois rares
Une vive lumière volée
Douleur salle de bain seul le miroir mire ses
pleurs de lavabo sans qu’elle n’y puisse rien
Là où le bleu s’étend du pays de bohème aux
points de fuite il lui faut s’arrimer si éprise
qu’elle soit de la rive interdite
Longeant les coulées les chênaies elle cherche
un, deux points d’appui Point d’épines point de
mépris Lacéré dans sa chair l’aubier ronce en
son imaginaire
Elle relève ses pas dans le cyan glacial elle crie
aussi fort que sa voix lui paraisse inconnue aussi
fort que ce chant féminin enflamme l’ultime
lambeau de rêve et la revête virginale
Dans le miroir les infimes poussières l’emparent
Elle voit de longs voyages blonds sur le radeau
délivrant s’éveille sur les troncs joints des
supplices médusée d’inquiétude dans l’œil de la
tempête Elle voit l’immense mer et l’Atlantide en
fête Voit l’immergé de la vague voit
comme la loi la noie
Hors d’elle sa peau libre se délite
Au cœur des jours trop calmes, son orage
Au cœur de la misère à lame d’échafaud tangue
le radeau tangue le miroir aux alouettes tanguent
les corbeaux
A l’aplomb du fil qui n’est pas l’horizon clair
tangue le bleu pays son étendard, brandi qu’il est
du ventre de ses barricades
Est-ce là qu’elle tombe sous le fer des brigades
le drap blanc de la paix lui servant de linceul est
-ce loin des musiques égéennes qu’elle devra
s’allonger sur la peau de l’adieu
S’il fallait y passer soulever les paupières
entrevoir son visage fier et soucieux son regard
comblé d’espace et d’étreintes stellaires
Serpentant les paupières, un battement de peu
Voir ses lèvres dire les versets de Virgile voir ses
lèvres et gémir la bouche emplie de vide Au
coin de la mer, une crique de rien
Elle dirait à sa joue le plus subtil baiser
Le monde entier y ferait pénitence
Aile, se connaît si peu, se tremble dans les mains
Pauvre nu vibrant Le creux de l’amour suffit
accueillant les falaises d’où son âme se jette Au
plongeon corolle la gravitation, change le
paradigme, se calice gracieuse la danse céleste
aux sons purs voilés et ondulants de la voix
méconnue
Elle s’épanche en ruisseau où personne n’a bu
A la chute des jours brûlants, à la mer, son orage